Akhannouch ou la fin d’une illusion majoritaire

8 أكتوبر 2025
Akhannouch ou la fin d’une illusion majoritaire

Chouaib Sahnoun
Sous la pression d’une contestation sociale inédite menée par la Génération Z212, le chef du gouvernement marocain Aziz Akhannouch tente de recoller les morceaux d’une coalition déjà moribonde. Lundi, à Rabat, il a convoqué ses alliés de l’Istiqlal et du PAM pour une réunion de “clarification”. En réalité, il s’agissait d’un conseil de guerre dans un gouvernement fracturé, où la solidarité n’est plus qu’un mot creux.
Les récentes déclarations de certains ministres du PAM et de l’Istiqlal, jugées trop indulgentes envers les revendications des jeunes manifestants, ont mis le feu aux poudres.
Ces propos, interprétés comme des signaux de désolidarisation, ont révélé une vérité dérangeante : les alliés d’Akhannouch ne croient plus en lui.
Derrière les sourires de façade, les réunions de crise et les communiqués convenus, c’est un gouvernement à bout de souffle qui s’accroche à ses privilèges plus qu’à son programme.
Dans les coulisses, les tensions sont palpables. “Le RNI est devenu un boulet politique”, confie une source proche du PAM. “Personne ne veut s’enliser dans une impopularité collective.”
Cette prudence n’est pas que tactique : elle traduit la peur du naufrage, celle d’un pouvoir qui se délite à mesure que le pays s’enfonce dans la défiance.
Face à la colère de la rue, Akhannouch a choisi le silence, ou plutôt, l’effacement.
Ni discours, ni gestes forts, ni réformes urgentes : le chef du gouvernement a préféré se retrancher derrière l’appareil sécuritaire, comme si la répression pouvait suppléer la politique.
Mais à force de se taire, il a laissé le champ libre à d’autres : ses alliés, les médias publics, et même certaines institutions, qui, sentant le vent tourner, commencent à s’émanciper du contrôle gouvernemental.
Dans un pays où le pouvoir s’exprime d’ordinaire à sens unique, le silence du sommet devient une parole en soi. Celle d’un exécutif sans boussole, d’un leader devenu gestionnaire de crise permanente.
Longtemps fidèle relais du discours officiel, la télévision nationale donne désormais la parole à des jeunes, des syndicalistes, des enseignants, des citoyens longtemps invisibles.
Ce geste, en apparence anodin, signe la fin du monopole narratif du gouvernement.
Pour Akhannouch, c’est un double revers : médiatique et politique.
Quand le message officiel se fissure, le pouvoir perd l’un de ses piliers symboliques ,celui du contrôle du récit.
Les rumeurs d’un remaniement imminent circulent avec insistance. Les ministres de la Santé et de l’Éducation nationale seraient dans le collimateur.
Mais ces têtes offertes en sacrifice ne suffiront sans doute pas à calmer une opinion publique qui ne réclame plus des “ajustements”, mais une refondation du contrat social.
Akhannouch semble ne plus gouverner qu’à coups de rustines : mesures ponctuelles, promesses d’écoute, communications creuses. Pendant ce temps, la défiance s’enracine et les partis de la majorité se repositionnent déjà pour l’après-Akhannouch.
La réunion de lundi a confirmé ce que tout le monde savait : la majorité gouvernementale n’existe plus que sur le papier.
Le pacte de stabilité qui devait garantir cinq ans de calme politique s’est transformé en attelage d’intérêts concurrents, sans vision commune.
L’État, lui, semble amorcer une recomposition silencieuse : ouverture vers les jeunes, recentrage institutionnel, signaux d’écoute qui contournent désormais le gouvernement.
Akhannouch, lui, reste enfermé dans sa bulle d’isolement. Entre une rue qu’il ne comprend pas, des alliés qui s’éloignent et un appareil médiatique qui se libère, il incarne malgré lui le symptôme d’un système qui se défait.
Ce qui se joue aujourd’hui dépasse le destin personnel d’Akhannouch.
C’est la fin d’un cycle, celui d’une gouvernance fondée sur le contrôle, la communication et l’arrogance des chiffres.
Face à la génération Z, qui réclame du sens et de la justice, le pouvoir technocratique montre ses limites.
Et derrière la façade de stabilité, se prépare déjà une recomposition du champ politique marocain, où l’État semble chercher à se réinventer, pendant que son chef de gouvernement s’épuise à maintenir l’illusion du pouvoir.

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