Chouaib Sahnoun
À première vue, rien ne justifie une flambée des prix immobiliers à Khouribga. Cette ville de l’intérieur, ni touristique ni côtière, et dont la population est majoritairement issue des classes moyenne et populaire, affiche pourtant des tarifs de l’immobilier rivalisant avec ceux de métropoles plus attractives. Cette anomalie interroge de nombreux citoyens et observateurs locaux.
Alors, pourquoi les prix de l’immobilier à Khouribga sont-ils aussi élevés ?
Les acteurs dominants du secteur ,souvent qualifiés de “lobbys immobiliers” étiennent une influence démesurée sur l’offre foncière. Ils procèdent à une rétention volontaire des terrains disponibles, créant artificiellement une rareté qui fait mécaniquement grimper les prix. Grâce à leur pouvoir d’influence, ils imposent des tarifs largement déconnectés du pouvoir d’achat local.
La spéculation est également en cause. Des investisseurs achètent terrains et logements uniquement dans le but de les revendre plus cher, sans aucun projet de développement réel. Résultat : une bulle immobilière alimentée par des pratiques spéculatives, où les logements deviennent inaccessibles aux familles modestes.
Khouribga souffre d’un manque d’offre en logements adaptés, malgré une demande croissante, notamment liée à l’activité minière du phosphate. Ce déséquilibre aggrave la situation. Les familles cherchent désespérément à se loger dans un marché saturé, ce qui alimente davantage l’inflation des prix.
Bien que la ville ne soit pas touristique, sa proximité avec les mines de phosphate et les zones industrielles en fait un pôle d’emploi attractif. De nombreux travailleurs s’y installent, ce qui renforce la pression sur le marché immobilier. Ce phénomène aurait pu être mieux géré avec une vision urbaine coordonnée
Le laxisme des autorités locales, notamment dans les services chargés de l’urbanisme et de l’aménagement, contribue à l’anarchie du secteur. En l’absence de vision claire pour encadrer l’extension de la ville ou construire des logements sociaux en nombre suffisant, le marché reste livré aux intérêts privés.
Des coopératives tentent bien de proposer des logements à prix abordables, mais elles sont souvent court-circuitées par des spéculateurs qui achètent à bas prix et revendent très cher. Cela neutralise les efforts en faveur des classes modestes et creuse davantage l’écart entre offre et demande.
Cette situation crée un climat social tendu. Beaucoup de jeunes couples, travailleurs précaires ou familles monoparentales ne peuvent plus espérer devenir propriétaires dans leur propre ville. Certains évoquent même une forme d’”exclusion par les prix”.
Khouribga pourrait pourtant servir de modèle de développement équilibré, avec une politique publique claire en matière d’habitat et un contrôle rigoureux contre la spéculation. Mais sans une volonté politique ferme, la ville risque de devenir le symbole d’une urbanisation incontrôlée… au détriment de ses habitants.
