
Chouaib Sahnoun
L’ancien chef du gouvernement marocain et actuel secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement (PJD), Abdelilah Benkirane, semble plus que jamais naviguer à vue dans les eaux troubles de la géopolitique internationale. En pleine tourmente causée par l’escalade des tensions entre Israël et l’Iran, le leader islamiste affiche un positionnement pour le moins instable, changeant de discours au gré des événements, au point de semer la confusion jusque dans les rangs de ses propres partisans.
Il y a quelques jours à peine, Benkirane condamnait avec virulence l’alliance maroco-israélienne, allant jusqu’à demander la rupture totale des relations diplomatiques entre Rabat et Tel-Aviv. Il appelait à un soutien franc à l’Iran, qu’il présentait comme une victime d’une agression injustifiée. Ce discours, diffusé dans un contexte de solidarité islamique, semblait s’inscrire dans la ligne classique d’un PJD en perte de vitesse, tentant de raviver ses bases militantes.
Mais à peine le temps de digérer ce message que Benkirane opère un virage à 180 degrés. À la suite de l’attaque iranienne contre une base militaire américaine située sur le sol qatari ,attaque précédée d’un avertissement adressé à Washington, dans une manœuvre diplomatique calculée , l’ancien Premier ministre s’en est violemment pris à Téhéran. Il a dénoncé ce qu’il considère comme une atteinte grave à la souveraineté d’un pays frère, le Qatar, jetant ainsi aux orties ses louanges précédentes envers la République islamique.
Cette volte-face soulève des interrogations légitimes. Comment expliquer un tel revirement si soudain ? Plusieurs analystes pointent du doigt les liens anciens et bien connus entre le PJD et le Qatar, ce dernier étant un généreux bailleur de fonds de multiples mouvements islamistes à travers le monde. Le soutien tacite du PJD à Doha aurait donc imposé à son chef un rétropédalage stratégique, dicté moins par une lecture idéologique que par un réflexe de préservation d’intérêts financiers et politiques.
Ce n’est pas la première fois que Benkirane se contredit publiquement. Depuis son retour à la tête du parti après une longue traversée du désert, il multiplie les déclarations contradictoires, oscillant entre populisme religieux et pragmatisme diplomatique mal assumé



