Chouaib Sahnoun
La manœuvre est grossière, mais révélatrice. Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, figure de proue du PAM, a violemment attaqué Abdelilah Benkirane, l’ancien chef du gouvernement et leader emblématique du PJD, lors d’une intervention sur une radio privée. Loin d’être un simple échange d’amabilités politiques, cette sortie ressemble fort à une tentative de diversion, alors que le ministre est lui-même éclaboussé par des accusations d’enrichissement illicite et de fraudes fiscales, qui pourraient lui coûter cher si la justice décidait d’instruire l’affaire
Plutôt que de s’expliquer sur ces soupçons embarrassants, Ouahbi a préféré revêtir sa robe d’avocat pour prononcer un réquisitoire virulent contre son vieil adversaire islamiste. Avec un ton sentencieux, il a prédit la fin imminente de la carrière politique de Benkirane, qu’il voit déjà balayé par les électeurs lors des législatives de 2026. Le PAM, son parti, rêve ouvertement de cette échéance, espérant en finir avec l’ère Akhannouch pour s’installer aux commandes du gouvernement
Selon Ouahbi, Benkirane serait devenu un « vestige du passé », incapable de se renouveler, isolé dans son propre camp, et abandonné par les cadres historiques du PJD. Il va jusqu’à le décrire comme un homme en « déclin mental », reclus dans sa maison, s’adressant à son téléphone dans des vidéos décousues, entre colère et mégalomanie
Mais à bien y regarder, cette offensive a tout d’un écran de fumée. Car celui qui distribue les coups médiatiques est lui-même en difficulté. Les révélations récentes sur sa situation patrimoniale et ses déclarations fiscales ont entaché son image, et nombreux sont ceux qui voient dans ses attaques une stratégie pour détourner l’attention. Dans une opinion publique lassée des jeux d’ego et des règlements de comptes personnels, l’attente est ailleurs : elle exige des comptes, de la transparence, et des actes