
Chouaib Sahnoun
Le monde politique et sanitaire marocain est secoué. Le procureur général près la Cour d’appel de Rabat a ordonné, ce mercredi, l’ouverture d’une enquête judiciaire à la suite des révélations explosives d’Abdellah Bouanou, président du groupe parlementaire du PJD. Lors d’une intervention remarquée à la Chambre des représentants, Bouanou a dénoncé de possibles irrégularités dans les marchés publics de médicaments relevant du ministère de la Santé et de la Protection sociale.
Selon le député, des « soupçons de manipulation et d’attribution opaque de marchés de montants faramineux » entacheraient la gestion de certains dossiers sensibles. Il évoque notamment un marché attribué à une entreprise appartenant – toujours selon ses déclarations – à un ministre en exercice, une accusation d’une rare gravité qui met en lumière le spectre d’un conflit d’intérêts aux ramifications encore floues.
La polémique a rapidement enflé, d’autant que Bouanou insiste sur la nécessité d’une enquête « exhaustive et indépendante », pointant du doigt un secteur où les enjeux financiers colossaux côtoient les vulnérabilités du citoyen. En effet, la question des médicaments, particulièrement ceux liés au traitement du cancer, reste l’un des terrains les plus sensibles, où la frontière entre intérêt public et intérêts privés se brouille dangereusement.
Au Parlement, Bouanou a réitéré sa demande de mise en place d’une commission d’enquête parlementaire, estimant que l’affaire touche au cœur de la santé publique et exige la plus grande transparence. Il rappelle les écarts parfois vertigineux entre les prix des médicaments importés et leurs prix réels sur le marché international, un décalage qui, selon lui, serait révélateur de l’influence persistante du lobby pharmaceutique, réputé pour sa capacité à orienter les décisions publiques dans l’ombre.
Pour le parlementaire, seule une commission d’enquête, outil constitutionnel de vérité et de reddition des comptes, permettra d’établir les responsabilités, de séparer le factuel du politique et de restaurer la confiance d’une opinion publique souvent méfiante face à ce secteur.
Si l’enquête judiciaire va désormais suivre son cours, ce dossier pourrait bien devenir l’une des affaires les plus révélatrices du rapport complexe entre politique, santé et intérêts économiques au Maroc.




