Chouaib Sahnoun
Un nouveau scandale de détournement de fonds publics secoue les sphères locales du pouvoir au Maroc. À Casablanca, Marrakech et leurs régions respectives, des révélations explosives viennent mettre en lumière un système opaque d’allocations financières détournées par des élus municipaux au profit de leur entourage personnel.
Selon des sources bien informées, des rapports confidentiels émanant des Cours régionales des comptes de Casablanca-Settat et Marrakech-Safi dénoncent de graves irrégularités dans l’octroi de subventions publiques à des associations dites “culturelles” ou “sociales” , dont beaucoup seraient en réalité fictives.
Le stratagème est désormais bien rodé : des élus locaux, présidents de communes ou simples conseillers municipaux, font attribuer des aides financières à des associations dirigées par leurs épouses, sœurs, enfants ou proches, souvent créées dans l’unique but de capter l’argent public.
Ces entités, parfois sans siège, sans activité réelle ni cadre légal, auraient perçu des subventions substantielles, sans convention, sans appel à projet, sans rapport d’activité, et sans aucune délibération préalable des conseils communaux , une obligation pourtant inscrite noir sur blanc dans l’article 92 de la loi organique 113.14. Certaines d’entre elles auraient même reçu plusieurs subventions la même année, sans qu’aucun audit ne soit mené.
L’un des cas les plus édifiants concerne la ville de Berrechid, où la femme d’un conseiller communal aurait bénéficié, en partenariat avec sa sœur présidente d’association, d’un contrat de gestion du transport scolaire, tout en exploitant un bien immobilier appartenant à la commune. Un conflit d’intérêts manifeste, en violation directe de l’article 65 de la même loi, qui interdit clairement à tout élu de bénéficier personnellement ou par intermédiaire d’un marché ou contrat public.
Face à la gravité des faits, le ministère de l’Intérieur, par la voix de Abdelouafi Laftit, a appelé les walis et gouverneurs à appliquer les procédures de révocation immédiate à l’encontre des élus impliqués dans de tels abus.
Cette affaire, qui pourrait n’être que la partie émergée de l’iceberg, relance le débat national sur la transparence de la gestion locale, la moralisation de la vie publique et la nécessité urgente de réformer les mécanismes de financement associatif au niveau communal.
Au-delà du simple détournement de fonds, ces révélations mettent en lumière une instrumentalisation du tissu associatif à des fins électoralistes, avec des fonds publics utilisés pour acheter la loyauté d’un réseau clientéliste en période pré-électorale.
Dans un contexte où la défiance des citoyens envers les institutions locales ne cesse de croître, ce type de pratiques pourrait porter un coup fatal à la légitimité des élus et à la confiance dans l’État de droit.
Le Maroc est-il prêt à rompre avec les logiques de favoritisme et à instaurer une culture de reddition des comptes ? L’opinion publique attend des réponses concrètes.