Diplomatie de façade et silences coupables : comment le régime des caporaux a affaibli l’Algérie sur la scène mondiale

منذ ساعتين
Diplomatie de façade et silences coupables : comment le régime des caporaux a affaibli l’Algérie sur la scène mondiale

Chouaib Sahnoun
L’Algérie aime se draper dans le costume flatteur de l’avocate des « causes justes ». Sahara occidental, Palestine, lutte anti-impérialiste : le discours officiel est rodé, martelé à l’envi par une diplomatie qui se veut morale et intransigeante. Pourtant, à l’épreuve des faits, le passage d’Alger au Conseil de sécurité des Nations unies en 2024-2025 révèle une réalité bien moins glorieuse : celle d’un régime militaire prudent jusqu’à la lâcheté, incohérent dans ses positions et de plus en plus marginalisé sur la scène internationale.
Le mandat de l’Algérie comme membre non permanent du Conseil de sécurité, censé consacrer son retour en force diplomatique, s’achèvera le 31 décembre 2025 sur un constat amer. Sur les deux dossiers érigés en « priorités nationales » par le pouvoir – le Sahara occidental et la Palestine – Alger a accumulé les renoncements, les silences et les contorsions.
Sahara occidental : le grand reniement
Deux résolutions majeures ont été adoptées par le Conseil de sécurité durant le mandat algérien : la résolution 2756 (31 octobre 2024) et la résolution 2797 (31 octobre 2025). Deux occasions historiques pour Alger de traduire en actes son soutien proclamé au Polisario. Deux occasions manquées.
À la stupeur des partisans de la « république sahraouie », l’Algérie n’a tout simplement pas pris part aux votes. Ni opposition, ni abstention. Une absence politique lourde de sens. D’autres États, pourtant moins impliqués que l’Algérie dans ce conflit, ont assumé leurs positions : la Russie et le Mozambique en 2024, puis la Russie, la Chine et le Pakistan en 2025.
Ce choix de l’effacement trahit une réalité que le régime des caporaux se garde bien d’avouer : Alger redoute plus que tout la colère de Washington, principal architecte des résolutions onusiennes, aussi bien sous Joe Biden que sous Donald Trump. Les explications emberlificotées du ministre Ahmed Attaf, tentant de justifier cette non-participation, n’ont convaincu ni les observateurs avertis ni les alliés traditionnels de l’Algérie.
Une diplomatie à géométrie variable selon l’occupant de la Maison-Blanche
Sous l’administration démocrate, Alger s’était trouvé un certain confort diplomatique. Les visites d’Antony Blinken à Alger, en 2022 puis en 2024, ainsi que les échanges soutenus avec Ramtane Lamamra puis Ahmed Attaf, avaient nourri l’illusion d’un partenariat stratégique. Les discussions portaient aussi bien sur Gaza que sur la sécurité maritime en mer Rouge.
Ce rapprochement avait permis à Alger d’obtenir un sursis : le gel de la mise en œuvre des décisions de Donald Trump reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara, dont l’ouverture d’un consulat américain à Dakhla.
Mais le retour de Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025 a brutalement dissipé ces illusions. Washington a relancé l’exécution de ses engagements envers Rabat, tandis qu’Alger, fidèle à sa nouvelle doctrine de prudence extrême, s’est contentée d’interventions fades et sans relief au Conseil de sécurité.
La Palestine sacrifiée sur l’autel de la realpolitik
Plus grave encore, l’Algérie a également tourné le dos à la cause palestinienne, pourtant pilier central de sa rhétorique officielle. Le 18 novembre, Alger a voté en faveur du plan Trump pour Gaza, un texte largement contesté et rejeté par de nombreuses forces palestiniennes. La Russie et la Chine, elles, avaient choisi de s’abstenir.
Ce plan prévoit une force internationale de stabilisation à Gaza, travaillant en coordination avec Israël et excluant totalement le Hamas et le Jihad islamique de l’après-guerre. Malgré les appels pressants de ces mouvements à ne pas soutenir la résolution 2803, l’Algérie a fait le choix de l’alignement, révélant une fois de plus l’écart abyssal entre son discours révolutionnaire et sa pratique diplomatique.
Un isolement diplomatique de plus en plus visible
Ces reniements successifs ne sont pas des accidents. Ils traduisent l’érosion profonde de l’influence algérienne en Afrique, dans le monde arabe et en Europe.
Au Sahel, les relations avec le Mali, le Niger et le Burkina Faso sont désormais exécrables, au point de réduire à néant la Coordination de Tamanrasset, autrefois présentée comme un pilier de la sécurité régionale. En Afrique australe, Alger ne doit son maintien que grâce au soutien résiduel de l’Afrique du Sud.
Dans le monde arabe, la marginalisation est tout aussi flagrante : l’Algérie a été écartée par Riyad d’une réunion clé sur la Syrie en 2023, un camouflet diplomatique révélateur de sa perte de crédibilité.
En Europe, les bras de fer avec l’Espagne et la France autour du Sahara se sont soldés par des échecs cuisants. Ni Madrid ni Paris n’ont infléchi leur position, et l’Union européenne a rapidement neutralisé les mesures de rétorsion algériennes contre l’Espagne.
Le gaz : dernier levier en voie d’épuisement
Même l’arme énergétique, longtemps brandie comme un moyen de pression stratégique, s’émousse. L’accord énergétique massif entre l’Union européenne et les États-Unis, entré en vigueur en août, réduit considérablement la dépendance européenne au gaz algérien. L’Espagne a déjà remplacé une partie de ses importations par du GNL américain, tandis que l’italien Edison, contrôlé par EDF, a amorcé la même transition.
À terme, un éventuel retour du gaz russe sur le marché européen, en cas d’accord sur l’Ukraine, achèverait de reléguer l’Algérie au rang d’acteur secondaire.
Conclusion : le prix du pouvoir militaire
Derrière les slogans creux et les postures moralisatrices, le régime des caporaux paie aujourd’hui le prix de décennies de diplomatie instrumentalisée, soumise aux impératifs de survie du pouvoir militaire plutôt qu’aux intérêts stratégiques du pays. Le mandat algérien au Conseil de sécurité, loin d’être un triomphe, restera comme le symbole d’un affaiblissement inédit, où l’Algérie a parlé fort… mais agi en silence.

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